Etude des mécanismes pathogéniques de la myasthénie auto-immune

Contexte

La myasthénie (MG) est une maladie auto-immune due à la présence d'anticorps dirigés contre des composants de la membrane musculaire localisés au niveau de la jonction neuromusculaire. Dans la majorité des cas, il s’agit d’auto-anticorps dirigés contre le récepteur de l'acétylcholine (RACh). L’origine de la réponse auto-immune n’est pas connue, mais les anomalies thymiques et les défauts de régulation du système immunitaire jouent certainement un rôle majeur chez les patients avec anticorps anti-RACh. Il a ainsi été montré que les contaminants environnementaux pouvaient être impliqués dans l’induction de la myasthénie via une dérégulation des lymphocytes pro-inflammatoires Th17 par l’intermédiaire de leur récepteur AhR. Dans le thymus MG, l’équilibre du couple composé des lymphocytes T régulateurs (Treg) (anti-inflammatoire) et des lymphocytes Th17 joue un rôle important. En effet, il a été suggéré que la surexpression des cytokines IL-17 et IL-6 par les Th17 pourrait contribuer à l’entretien de phénomènes inflammatoires pathogènes et à une production d’auto-anticorps.

Durée d’intervention d’Inovarion

12 mois

 

Objectifs scientifiques

Dans ce contexte, le projet mené a eu pour objectif de mieux comprendre la physiopathologie de la MG en utilisant des modèles expérimentaux précliniques de myasthénie auto-immune. Il s’agissait notamment d’analyser l’implication de la voie  IL-17/IL-23 dans la myasthénie. Les travaux ont eu pour objectif final de développer une thérapie innovante pour traiter la myasthénie auto-immune qui pourrait se baser sur l’utilisation d’anticorps monoclonaux ciblant la voie IL-17/IL-23.

 

Incertitudes, difficultés et complexités technologiques

Les travaux entrepris présentaient les incertitudes, les difficultés et les contraintes technologiques et conceptuelles suivantes :

  • Effets des interactions entre cellules épithéliales thymiques (CET) et lymphocytes CD4 sur l’axe IL-17/IL-23: comparaison cellules épithéliales MG/cellules saines
  • Effets des interférons sur l’axe IL-17/IL-23: comparaison cellules MG/cellules saines
  • Analyse immunohistochimique des protéines impliquées dans l’équilibre entre la voie IL17/IL23 et les cellules Treg dans le thymus

 

Description des travaux effectués

La caractérisation de la voie IL-17/IL-23 a été réalisée à partir de biopsies thymiques et sur des modèles in vitro utilisant des cultures primaires de cellules épithéliales thymiques (CETs) et/ou de lymphocytes (PBMC). Une signature cytokinique favorisant le développement des lymphocytes Th17 a ainsi été retrouvée dans les thymi de patients myasthéniques. Par ailleurs, un sous-groupe pathogène a été identifié lorsque cette famille cellulaire est confrontée à la cytokine TGFβ3. De plus, les thymi de patients myasthéniques analysés par RT-QPCR indiquent que le TGFβ3 est surexprimé en comparaison des thymi contrôles. Cette dernière observation est également vraie pour l’interleukine 23 dont l’expression est augmentée dans les CETs de patients myasthéniques en comparaison des CETs contrôles. Au niveau protéique, une analyse par immunohistochimie de biopsies thymiques révèle une accumulation d’IL-23 dans les espaces inter-lobulaires et une augmentation significative du niveau d’expression de cette cytokine par les cellules épithéliales.

Afin de déterminer si l’augmentation de la sécrétion d’IL-23 par les CETs myasthéniques peut induire des changements dans les populations lymphocytaires Treg et Th17, des lymphocytes T CD4+ contrôles ont été mis en culture avec des CETs contrôles ou myasthéniques. Dans ces conditions, les CETs contrôles n’induisent pas de changement d’expression des marqueurs signatures des lymphocytes Th17 (IL-17 et RORc), alors que les CETs myasthéniques induisent des modifications d’expression de ces marqueurs.

Dans le but d’identifier la sous population Th17 pouvant être responsable de l’inflammation observée dans les thymus MG, des cellules CD4+ thymiques ont été analysées par cytométrie de flux. Les résultats obtenus indiquent qu’il existe un enrichissement Th17 au niveau des thymi myasthéniques. Par ailleurs, l’expression de podoplanine évaluée par RT-qPCR est supérieur dans les thymi et les CETs myasthéniques que  dans la situation contrôle.

 

Résultats obtenus

L’ensemble des résultats obtenus a donné lieu à la rédaction d’un article original intitulé « Cultured Human Thymic-Derived Cells Display Medullary Thymic Epithelial Cell Phenotype and Functionality » par Villegas JA, Gradolatto A, Truffault F, Roussin R, Berrih-Aknin S, Le Panse R, Dragin N publié dans Frontiers in Immunology en 2018 (doi: 10.3389/fimmu.2018.01663. eCollection 2018; PMID: 30083154)